Pour commémorer le 50ème anniversaire du Traité de Rome, instituant la Communauté Economique Européenne, les dirigeants européens se sont retrouvés à Berlin et ont adopté une Déclaration commune. Cette déclaration fixe 2009, comme objectif d'entrée en vigueur d'un nouveau traité européen : "Nous partageons l'objectif d'asseoir l'Union européenne sur des bases communes rénovées d'ici les élections au Parlement Européen de 2009".
Les 27 membres de l'Union Européenne s'engagent donc à ce qu'un nouveau traité facilitant le fonctionnement des institutions européennes, et remplaçant le traité constitutionnel rejeté en 2005 par referendum en France et aux Pays-Bas, entre en vigueur. Cela semble donc ouvrir la voie à une renégociation du traité constitutionnel européen. Le Président polonais Lech Kaczynski a néanmoins estimé que la mise en oeuvre d'un nouveau traité européen avant 2009 était "irréaliste".
Si on entre dans la voie de la renégociation, l'adoption d'un mini-traité ou d'un traité simplifié, par les Parlementaires français, dès l'été 2007, comme le prévoit Nicolas Sarkozy, semble compromise. De la même manière, la volonté de Ségolène Royal ou de François Bayrou de provoquer un nouveau referendum en 2009, paraît tardif, si l'on suit le calendrier de cette Déclaration de Berlin.
Je pense qu'on ne peut qu'inviter les dirigeants européens à méditer, à travers cet extrait des Mémoires d'Espoir - Le Renouveau (1958-1962), ces quelques mots du Général de Gaulle :
"Ainsi commencée, la mise en oeuvre du Marché commun va donner lieu à un vaste déploiement d'activités, non seulement techniques, mais aussi diplomatiques. En effet, l'opération, indépendamment de sa très grande portée économique, se trouve enveloppée d'intentions politiques caractérisées et qui tendent à empêcher la France de disposer d'elle-même. C'est pourquoi, tandis que la Communauté se bâtira dans les faits, je serai, à plusieurs reprises, amené à intervenir pour repousser les menaces qui pèsent sur notre cause.
La première tient à l'équivoque originelle de l'institution. Celle-ci vise-t-elle - ce qui serait déjà beaucoup ! - à l'harmonisation des intérêts pratiques des six Etats, à leur solidarité économique vis-à-vis de l'extérieur et, si possible, à leur concertation dans l'action internationale ? Ou bien, est-elle destinée à réaliser la fusion totale de leurs économies et de leurs politiques respectives afin qu'ils disparaissent en une entité unique ayant son Gouvernement, son Parlement, ses lois, et qui régira à tous égards ses sujets d'origine française, allemande, italienne, hollandaise, belge ou luxembourgeoise, devenus des concitoyens au sein de la patrie artificielle qu'aura enfantée la cervelle des technocrates ? Il va de soi que, faute de goût pour les chimères, je fais mienne la première conception. Mais la seconde porte tous les espoirs et toutes les illusions de l'école supranationale. [...]
A quelle profondeur d'illusion ou de parti pris faudrait-il plonger, en effet, pour croire que des nations européennes, forgées au long des siècles par des efforts et des douleurs sans nombre, ayant chacune sa géographie, son histoire, sa langue, ses traditions, ses institutions, pourraient cesser d'être elles-mêmes et n'en plus former qu'une seule ? A quelles vues sommaires répond la comparaison, souvent brandie par des naïfs, entre ce que l'Europe devrait faire et ce qu'ont fait les Etats-Unis, alors que ceux-ci furent créés, eux, à partir de rien, sur une terre nouvelle, par des flots successifs de colons déracinés ? Pour les Six, en particulier, comment imaginer que leurs buts extérieurs leur deviennent soudain commun, alors que leur origine, leur situation, leur ambition, sont très différentes ?"
En espérant que ce message qui, s'il était d'actualité, pour six Etats, ne l'est que davantage avec 27 pays membres de l'Union Européenne, sera entendu par les futurs "négociateurs" du nouveau traité.
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