Il aura eu le courage de dire "non" au Président de la République qui l'avait promu au grade de chevalier de l'Ordre national de la Légion d'honneur. Et comme il n'est évidemment pas n'importe qui, son geste prend un sens particulier. Henri Torre a été Secrétaire d'Etat dans le Gouvernement de Pierre Messmer en 1973 - 1974, Député, Sénateur pendant 28 ans, entre 1980 et 2008 et Président du Conseil Général de l'Ardèche pendant 16 ans, de 1982 à 1998.
Henri Torre a donc décidé de refuser cette distinction, et cela pour deux raisons. Tout d'abord, l'ancien Ministre estime que la Légion d'honneur n'a plus la même valeur qu'autrefois : "Des Français très méritants l'ont reçu, mais quand je vois que des personnes en difficulté avec la justice l'ont également reçu, ce n'est pas ma conception de cette décoration." Rappelant que le Président Charles de Gaulle n'avait "jamais transigé avec ce symbole républicain", Henri Torre "déplore aujourd'hui la dérive clientéliste de son mode d'attribution" et pose la question : "Que devient alors la garantie morale attachée à cette décoration ?"
Cela va dans le sens de ce que j'écrivais il y a quelques mois, dans ce billet : "Concernant la Légion d'honneur qui est, je le rappelle, la plus haute décoration française, récompensant "les mérites acquis par les citoyens, en dehors de toute considération sociale ou héréditaire et ce, dans tous les secteurs d'activité du pays", ne devrait-elle pas être remise avec une plus grande indépendance d'esprit ? Est-il normal de constater que des copains, des proches du Président de la République soient élevés, en nombre important à cette distinction ? Etre copain du Chef de l'Etat pour obtenir ce que l'on ne peut plus assimiler que comme une simple récompense ! Et remise non pour services rendus à l'Etat, mais à une équipe, ce qui est scandaleux."
Ensuite, la seconde motivation qui pousse l'ancien Ministre à refuser cette décoration est politique. L'ancien sénateur UMP affirme clairement "qu'il n'approuve pas l'action du Chef de l'Etat" Nicolas Sarkozy, et qu'il ne le soutient pas : "Je ne peux plus avoir confiance en le principal intéressé, comme j'ai pu l'avoir en 2007".
Deux excellentes raisons qui expliquent la décision d'un homme qui nous prouve qu'il y a encore en France, des personnalités avec des convictions fortes, qui ont un grand sens de l'Etat et qui ne sont pas prêts à tout sacrifier pour un bénéfice personnel. Une belle leçon de courage moral que nous offre Henri Torre en ce début d'année. Une leçon tout à son honneur. Sachons nous en inspirer.
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