Incroyable éditorial du Monde aujourd'hui. En pleine crise de l'euro, sous le titre "Ne l'oublions pas, l'euro est un atout", Le Monde publie dans son édition du jour, un papier qui va à l'encontre du bon sens et qui n'est pas sans rappeler le ouiouisme béat de la presse parisienne, au moment du referendum de 2005, alors que le peuple votait massivement "non". Depuis 6 ans, certains n'ont toujours rien compris. L'éditorial non signé que voici, le prouve :
"L'actualité de la zone euro est tellement sinistre - l'interminable tragédie grecque et les risques que celle-ci contamine plusieurs autres pays - qu'on prendrait volontiers la monnaie unique pour une malédiction. Une de ces bonnes idées qui aurait mal tourné.
Rien n'est plus faux : l'euro est un atout. Il a bien servi l'union monétaire depuis sa mise en circulation en 2002. Il est l'un des éléments qui font que l'Europe a un avenir dans le monde de demain.
Cela, il faut le répéter au moment où la crise née de la dette souveraine européenne fait douter de l'euro. Celui-ci n'est pour rien dans l'état désastreux des finances publiques grecques, dans l'endettement bancaire irlandais, ni dans celui des comptes publics du Portugal.
Le montant du déficit fédéral américain ou celui de la dette britannique montrent que les déséquilibres budgétaires ne sont nullement l'apanage de la zone euro.
Les philosophes devront s'interroger un jour sur cette caractéristique des démocraties occidentales en ce début du XXIème siècle : elles sont toutes lourdement endettés. Et, pour l'essentiel, cet endettement public précède la crise financière de 2008 - 2009.
On estime que seuls 20% à 30% du déficit de ces pays sont imputables aux mesures de relance prise en 2008 - 2009 pour lutter contre la récession. Le reste relève d'une singulière propension à la dette, dont les causes ne sont sans aucun doute pas qu'économiques.
Exprimé en monnaies nationales, il est à peu près certain que cet endettement aurait conduit nombre de pays aujourd'hui membres de la zone euro, notamment la France, à dévaluer plusieurs fois ces dernières années - et la perte de valeur d'une monnaie est une perte de pouvoir d'achat qui touche d'abord les plus pauvres.
C'est l'un des grands mérites de l'euro : il a été un bouclier contre les chocs financiers de l'époque. Il a permis à ceux qui l'ont adopté de maintenir l'inflation sous contrôle et de connaître des taux d'intérêt historiquement bas.
Sa relative bonne tenue face aux autres grandes devises - certains jugent même l'euro surévalué - a diminué le prix auquel les membres de la zone achètent leurs matières premières. Enfin, supprimant le risque de change, il a présidé à un accroissement sans précédent du commerce intra-européen.
Tout cela, qui est considérable, se traduit en précieux points de croissance que nous n'aurions pas eu sans la monnaie unique. Le monde de demain sera organisé autour de trois à quatre blocs monétaires. L'Europe sera l'un d'eux avec l'euro : c'est la garantie de peser un peu dans la compétition globale.
Il y a un prix : l'euro suppose une coordination des politiques budgétaires, encore balbutiante. Et qui peut heurter la sensibilité des plus attachés à la souveraineté nationale. Mais si l'on en croit les sondages, une majorité des Européens sont disposés à aller plus avant dans l'harmonisation des politiques budgétaires. C'est du côté des politiques que le souffle manque."
On pourrait reprendre le terme d'un ancien Président de la République pour qualifier ces quelques lignes, d'abracadabrantesques, tant elles sont étrangères à la réalité vécue par les Français.
Alors Le Monde peut évoquer dans son dernier paragraphe, des "sondages" (lesquels ?) où sont consultés les "Européens", pour étayer des thèses fantaisistes. Quel dommage que les votes des "Européens" (des Français et des Néerlandais en 2005), qui ont pourtant une toute autre valeur que des "sondages", ne bénéficient pas de la même considération de la part de ce quotidien. Et même pour les sondages, Le Monde semble avoir oublié celui qui annonçait, il y a quelques mois, que 62% des Français estimait que l'euro avait tendance à aggraver les effets de la crise économique, un sondage TNS Sofres réalisé pourtant pour... Le Monde.
A croire que tout ce qui peut appuyer cette idée qui consiste à affirmer que "l'euro est un atout", idée pourtant considérée comme farfelue par une majorité de Français, est bon à prendre. Un tel édito, c'est ce qu'on appelle du journalisme engagé, presque idéologique, comme on en a connu dans d'autres pays européens, en des temps pas si éloignés.
D'après Le Monde, l'euro a de "grands mérites" : "il a été un bouclier contre les chocs financiers". Que ses journalistes se posent donc la question de savoir si la Suède avec une croissance à 4% ou le Royaume-Uni, avec une croissance à près de 3% et un taux de chomage de deux points inférieur à celui de la France, ont vécu plus durement que les pays membres de la zone euro, la crise financière de 2008 - 2009...
L'euro aurait ensuite permis "de maintenir l'inflation sous contrôle" : voilà qui relève d'une grande malhonnêteté intellectuelle. Le Monde oublie clairement que l'inflation en France est "sous contrôle" depuis la fin des années 1980 et l'inflation était même inférieure à la fin des années 1990 avec le franc, que durant les années 2000 avec l'euro ! Et sérieusement, à qui voudrait-on faire croire que les prix n'ont pas augmenté avec le passage à l'euro ?
En plus, l'euro aurait "présidé à un accroissement sans précédent du commerce intra-européen". Heureusement ! C'était un objectif, pour ne pas dire l'objectif premier, de la création de la monnaie unique. Sauf que Le Monde, n'évoque pas le commerce extra-européen et le déficit commercial de la France depuis la mise en place de la monnaie unique, plombé notamment par un euro trop cher, que le journal semble même discuter. Un déficit commercial, source de chômage, qui atteint des sommets en France, entre 60 et 70 milliards d'euros (plus de 400 milliards de francs !).
Un déficit commercial qui n'est d'ailleurs pas étranger à l'endettement de la France. Oser écrire que l'euro "n'est pour rien" dans l'endettement des pays membres de la zone euro est d'ailleurs une erreur grossière. Si les Etats-Unis sont confrontés à une dette colossale, en raison notamment des dépenses liées à leurs engagements militaires parfois bien discutables dans différentes régions du monde, en France, la dette a commencé à se creuser au début des années 1980, avec l'arrivée de la gauche au pouvoir mais à partir de 2002, l'euro n'a fait qu'accentuer les déficits publics et l'endettement du pays.
Enfin, avec l'évocation des "précieux points de croissance que nous n'aurions pas eu sans la monnaie unique", Le Monde croit atteindre le comble de sa démonstration. Sauf qu'il est au sommet de sa bêtise. En effet, la moyenne de la croissance en France a été supérieure dans les années 1990 avec le franc (1,86%), à celle des années 2000 avec l'euro (1,36%), et cela même si on laisse à ce dernier chiffre, les bons résultats des années 2000 et 2001, obtenus avec le franc.
Le Monde peut donc toujours essayer de claironner que l'euro est un bienfait, les chiffres sont les chiffres et ils prouvent bien aujourd'hui, que la monnaie unique est surtout un handicap pour l'économie française. Et ce n'est certainement pas en poursuivant sur le même chemin, avec la dépossession d'une nouvelle part de notre souveraineté, concernant cette fois notre politique budgétaire, comme le souhaite Le Monde ou le patron de la Banque Centrale Européenne, Jean-Claude Trichet, que l'avenir sera plus radieux pour la France et les Français. Au contraire.
Comme l'écrivait, il y a deux jours, le Président de Debout La République, Nicolas Dupont-Aignan, "il n'est pas pire aveugle que celui qui ne veut pas voir !". Aujourd'hui, Le Monde ne veut vraiment pas voir. "Les philosophes devront s'interroger un jour sur cette caractéristique [de nombre de journalistes] en ce début du XXIème siècle", qui consiste à rester totalement enfermés dans cette pensée unique que les Français refusent chaque jour un peu plus !
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