25 ans après, presque jour pour jour, l'espoir de connaître enfin la vérité sur le meurtre du petit Grégory Villemin réapparaît. J'avais sept ans à l'époque des faits et je me souviens de cette affaire dont on apprenait les avancées de l'enquête tous les jours, à la télévision. Une affaire qui avait bouleversé les Français.
Rappel des faits : Le 16 octobre 1984, le corps de Grégory Villemin, 4 ans, est découvert pieds et poings liés dans la Vologne, à quelques kilomètres de son domicile de Lépanges-sur-Vologne, dans les Vosges. Son oncle a reçu quelques heures plus tôt l'appel téléphonique d'un corbeau revendiquant l'assassinat. Le lendemain, les époux Villemin reçoivent par courrier des nouvelles de ce meurtrier anonyme qui écrit : "Ton fils est mort. Je me suis vengé. J'espère que tu mourras de chagrin, le chef. Ce n'est pas ton argent qui pourra te redonner ton fils. Voilà ma vengeance, pauvre con." La lettre a été postée de Lepanges-sur-Vologne le jour du meurtre, avant la levée du courrier de 17h15.
Très vite, les soupçons se tournent vers Bernard Laroche, le cousin du père de Grégory. Le 5 novembre 1984, ce dernier est inculpé d'assassinat et écroué, après des expertises graphologiques et le témoignage accablant de sa belle-soeur âgée de 15 ans, Murielle Bolle. Deux jours après, l'adolescente se rétracte. Il est relâché le 4 février 1985, mais reste inculpé d'assassinat. Le 29 mars, à 13h15, devant le garage de la maison des Laroche, Jean-Marie Villemin abat Bernard Laroche.
Le 5 juillet 1985, au cours d'une visite à son mari, transféré à la prison de Saverne (Bas-Rhin), Christine Villemin est arrêtée par les policiers. Désignée comme possible corbeau par des graphologues, elle est inculpée de l'assassinat de son fils par le juge Jean-Michel Lambert : "Madame, je vous inculpe d'assassinat pour avoir tué votre enfant en préméditant votre geste". Onze jours plus tard, elle retrouve la liberté mais attendra le 3 février 1993 pour obtenir un non-lieu. La même année, Jean-Marie Villemin, qui a été condamné à cinq ans d'emprisonnement dont un avec sursis pour le meurtre de son cousin, est mis en liberté conditionnelle. Le juge Lambert est dessaisi le 25 juin 1987, au profit du président de la cour de Dijon Maurice Simon, qui reprend l'enquête de zéro.
Dans les années 2000, la justice, saisie par les parents du petit garçon, ordonne une reprise de la procédure et l'expertise d'un demi-timbre apposé sur une enveloppe expédiée par le corbeau. Après quatre mois d'examens, les experts déclarent le 17 octobre l'ADN inexploitable. Enfin, le 11 avril 2001, une décision clôt l'instruction.
En 2008, les parents de Grégory saisissent de nouveau le procureur général de Dijon et demandent la réouverture de l'instruction, pour une nouvelle recherche d'ADN, faisant valoir qu'en 24 ans les progrès de la science ont été importants, notamment dans le domaine de la génétique. Une étude scientifique, "qui estime aléatoires mais réelles les chances de succès" de trouver des "microphases d'ADN" sur les principaux scellés du dossier, convainc la cour d'appel de Dijon de rouvrir l'enquête. Depuis mai dernier, un laboratoire lyonnais manipule les vêtements que Grégory portait le jour de son assassinat, ainsi que les cordelettes entourant ses pieds et poignets, des enveloppes, des lettres et des timbres du corbeau.
Aujourd'hui, on apprend la découverte de deux ADN identifiables sur une lettre du corbeau, des ADN qui ne sont pas ceux des parents de Grégory. Par ailleurs, les experts ont découvert des "mélanges de plusieurs ADN masculin et féminin" sur une lettre de menaces adressée par le corbeau au grand-père de Grégory, le 24 juillet 1985. Sur le timbre de cette lettre, l'expertise indique "un profil ADN féminin qui permet une identification", d'après le procureur général de la cour d'appel de Dijon, Jean-Marie Beney. Enfin, sur certaines cordelettes ayant servi à ligoter Grégory, un mélange d'ADN a été mis en évidence, excluant ses parents, mais qui "permettra d'effectuer des comparaisons ultérieures" a poursuivi M. Beney.
Voilà de bonnes nouvelles. Et si même avec ces nouvelles données, obtenues grâce aux progrès de la science, la famille du petit Grégory obtenait enfin la vérité ? Ce serait inespéré, après tant d'années. Ces résultats sont une grande avancée vers la vérité. Mais seront-ils suffisants ? Personne ne peut le dire, mais l'espoir de retrouver le monstre qui a tué un petit bonhomme de 4 ans il y a un quart de siècle, existe. C'est aujourd'hui l'essentiel.
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