Lors de son Conseil national, le Parti Socialiste a annoncé samedi la constitution de ses listes pour les élections européennes du 7 juin prochain. Pour préparer ses listes, la direction du PS devait tenir compte du rapport de force issu du Congrès de Reims entre les partisans de Bertrand Delanoé, ceux de Benoît Hamon, ceux de Martine Aubry et bien sûr, ceux de Ségolène Royal. Mais elle devait également être attentive à la parité, aux souhaits des députés sortants, tout en esquissant un nécessaire renouvellement. Enfin, selon le souhait du PS, l'ouverture à la diversité et le non-cumul des mandats étaient également des impératifs. Autrement dit, mission impossible.
Si le résultat semble convenir à la majorité puisque le Conseil national a adopté ces listes à plus de 85%, dans certaines régions, les choix effectués commencent à faire des vagues, comme le signalait dès hier, mon ami FalconHill.
Ainsi dans la région Sud-Est, le député européen sortant de la région Nord-Ouest Vincent Peillon considère comme "un crève-coeur" sa désignation en tant que tête de liste dans le Sud-Est. Rappelant qu'il aurait souhaité être candidat dans SA région, l'ancien député de la Somme a enfoncer le clou en expliquant sur Europe 1 : "C'est contre mon plein gré" ! On sent la réelle volonté et la grande motivation de Vincent Peillon à vouloir représenter les habitants du Sud-Est au Parlement européen. Si après de telles déclarations, les électeurs de cette grande région Sud-Est ont encore envie de voter pour lui...
De la même manière, le Maire de Lyon, Gérard Collomb a montré au moins le même enthousiasme face au parachutage de Vincent Peillon dans le Sud-Est, jugeant la démarche "totalement inadmissible". Fustigeant "une parodie de démocratie", "comme au Comité central du PC d'U.R.S.S.", Gérard Collomb a expliqué avec sagesse "qu'on ne peut pas montrer autant de désinvolture en parachutant dans des régions, des gens qui n'ont jamais eu aucun contact avec les populations, qui ne connaissent pas les problèmes." Et avec une grande lucidité, Gérard Collomb a poursuivi son interview au Journal du Dimanche : "On parachute Vincent Peillon dans le Sud-Est et Henri Weber dans le Centre. Martine Aubry confisque tous les postes ou presque dans le Nord, un inconnu est bombardé numéro 2 dans l'Est pour faire plaisir à Benoît Hamon et à Henri Emmanuelli. Quelle tristesse..." Et d'ajouter : "C'est une grave erreur [...] Ces manoeuvres sont dangereuses : nous avons sur notre droite et notre gauche des partis qui vont récupérer la mise." Il est aussi à noter que Bernard Soulage, député européen socialiste sortant du Sud-Est, a indiqué qu'il refusait la place que lui avait attribuée le PS sur la liste : neuvième et donc inéligible.
Dans la région Est ensuite, deux candidats viennent de refuser d'être présent sur la liste Trautmann, afin d'en dénoncer la composition. La vice-présidente socialiste de Bourgogne, Safia Otokoré, figurant en neuvième position sur la liste a expliqué refuser la présence d'un "militant qui habite en Suisse, Mustapha Sadni", figurant en quatrième position. Le député européen sortant Pierre Pribetich a quant à lui refusé sa sixième place sur la liste socialiste alors "que la deuxième place a été attribuée à un illustre inconnu travaillant sur Paris" et "que la quatrième place a été affectée à un autre illustre inconnu travaillant sur Lyon". Ambiance...
Enfin, dans la région Massif Central - Centre le PS propose aux électeurs de voter pour un autre parachuté : Henri Weber. Co-fondateur avec Alain Krivine de la Ligue Communiste Révolutionnaire (devenu Nouveau Parti Anticapitaliste, il y a peu), Henri Weber a quitté l'extrême-gauche au début des années 1980, pour rejoindre le PS. N'y avait-il donc personne dans le Centre, le Limousin ou l'Auvergne capable de fédérer les différentes tendances du PS et d'incarner le renouvellement ? Il faut le croire dans la mesure où comme dans le Sud-Est, c'est encore un élu de la région Nord-Ouest qui sera la tête de liste dans le Centre. Henri Weber a en effet été Conseiller Municipal de Dieppe de 1995 à 2001, Sénateur de la Seine-Maritime de 1995 à 2004 et député européen sortant, tête de liste dans le Nord-Ouest en 2004. Il est donc bien implanté dans sa région. Il n'est donc pas certain qu'il montre un intérêt débordant pour les problèmes de notre région...
Mais, chacun a bien compris que Messieurs Peillon et Weber devaient laisser la place dans le Nord-Ouest afin que Martine Aubry puisse placer ses amis sur la liste de cette région. Dès-lors, il a bien fallu donner un lot de consolation à ces deux parlementaires européens. Et si dans le Sud-Est, l'arrivée de Vincent Peillon est loin de faire l'unanimité, dans le Centre, la venue d'Henri Weber n'est pas du goût de tous les socialistes, à l'image de la vice-présidente de la région Centre, Marie-Madeleine Mialot qui a annoncé renoncer à sa sixième place sur la liste Weber, motivant sa décision par son opposition aux parachutages "qui mettent en avant des gens qui ne jouissent pas d’un ancrage territorial".
Ce qui est certain, c'est que le département de l'Indre va perdre son parlementaire européen socialiste, André Laignel, qui a fait "le choix du coeur" en refusant de quitter la ville d'Issoudun dont il est maire et en n'acceptant pas d'être la tête de liste socialiste dans la région Massif Central - Centre. Voilà une décision courageuse, qui honore le premier magistrat d'Issoudun. Mais je constate, suite à cette décision qu'il n'y aura aucun représentant de l'Indre sur la liste PS.
L'étape suivante sera le vote des militants socialistes, le 12 mars prochain. Et le Maire de Lyon, Gérard Collomb en est persuadé : "dans de nombreuses régions [les militants] ne voteront pas pour ces listes." Pas sûr en effet que les nombreux parachutages soient appréciés par les militants locaux et pas certain non plus que les "socialistes soient [vraiment] rassemblés", comme l'affirmait la première secrétaire du PS Martine Aubry, samedi dernier.
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