Dans la Nouvelle République des 1er et 2 juillet 2006, Jean-Yves Gateaud qualifiait la compagne de François Hollande de "candidate révolutionnaire" et expliquait que Ségolène Royal était "jeune" et qu'il fallait que "le parti socialiste parle autrement". On peut se souvenir pourtant que dans l'Indre, la gauche en général et Monsieur Gateaud en particulier, n'ont pas toujours parlé de Madame Royal en termes si audacieux et que ce dernier n'a pas toujours trouvé qu'elle possédait de grandes qualités de dialectique...
Souvenez-vous, c'était il y a quelques années à Châteauroux, précisément à la fin de l'année 2001 - début 2002. Le 18 décembre 2001, un instituteur et deux aides éducatrices de l'école primaire Jean Zay à Châteauroux décident de fouiller des élèves à la suite d'un vol, la police étant prévenue, mais refusant de se déplacer. Ils sont aussitôt suspendus à titre conservatoire, ainsi que quatre autres institutrices, dans l'attente d'un conseil de discipline. Le 20 décembre, l'enquête administrative est lancée et le procureur est saisi d'une plainte d'un parent. L'affaire fait grand bruit et monte jusqu'aux oreilles du Recteur d'Académie et des Ministres de l'époque, Jack Lang, Ministre de l'Education Nationale et Ségolène Royal, Ministre déléguée à la Famille.
Toute fouille est en effet interdite dans les écoles par quiconque n'est pas habilité à cet effet. Un journaliste expliquait donc à l'époque que les enseignants avaient commis cette faute dans un souci pédagogique alors que Monsieur Patard, substitut du Procureur déclarait : "En cas de vol, les enseignants doivent appeler la police qui doit venir"... Le journaliste allait même jusqu'à souligner dans son article des 12 et 13 janvier 2002, qu'il y a "deux ou trois ans, tandis qu'on supprimait des postes d'enseignants en ZEP, on recrutait des agents auxiliaires de sécurité. La répression plutôt que l'éducation. C'est un choix." Voilà un bilan sans concession de la politique du gouvernement Jospin et de sa Ministre Ségolène Royal.
Soutenus par la très grande majorité des parents, des manifestations et une pétition de soutien (signée par plus d'un millier de personnes) en leur faveur, les enseignants et aides éducateurs ne subiront que des "sanctions apaisantes allant de l'avertissement à la mutation".
Ségolène Royal s'emploie alors à exploiter ce fait divers et parle "d'atteinte à l'intimité et à la dignité de l'enfant".
Après l'intervention de Ségolène Royal, les réactions sont partagées entre l'agacement et la colère dans la Nouvelle République du 18 janvier 2002 : par exemple Christophe Sibille, professeur à l'IUFM et père de famille : "Bravo, Madame Royal, quelle honnêteté intellectuelle et quelle responsabilité en exploitant un dossier dont vous ignorez de votre propre aveu tous les éléments ou presque, de flatter ainsi les télespectateurs-parents dans le sens du poil. Il est vrai que ces derniers représentent potentiellement en tous cas plus de bulletins dans les urnes que les enseignants. [...] La fouille ne fut tout au plus qu'une bêtise. [...] Mais certains responsables politiques ou administratifs ont sauté sur cette occasion pour se faire mousser".
Ou encore Didier Vallée, instituteur à Chambray-lès-Tours reproche à la Ministre de "mêler maladroitement respect et dignité des enfants et nécessaire intervention des adultes après un vol dans une école. Vos propos ont semé la terreur et la consternation." Voilà qui montre bien, sans vouloir faire de ces deux témoignages une généralité, quelle est l'opinion d'une majorité des enseignants vis-à-vis de la Ministre déléguée à la Famille de l'époque !
Et ce sont des témoignages du même type qui viennent de la gauche castelroussine : celui venant du Mouvement Des Citoyens (le mouvement de Jean-Pierre Chevènement) de l'Indre, dans la Nouvelle République des 19 et 20 janvier 2002 par exemple : "Le MDC tient à dénoncer les déclarations irresponsables et démagogiques de Ségolène Royal [...]." soulignant que l'école était soumise aux "formes de l'opportunisme politique".
Ou encore celui du parti communiste français (PCF) qui, dans la presse du 29 janvier explique que "la suspension des enseignants est une sanction avant la lettre qui apparaît aussi démesurée que les déclarations ministérielles."
Et c'est même au sein du propre groupe politique de la Ministre, le parti socialiste que l'on trouve des critiques appuyées : Jean-Yves Gateaud, alors Député de l'Indre (pour quelques jours encore) en visant les propos de Ségolène Royal explique : "Condamner les agissements c'était juste ; utiliser le mot de "perversité" ne l'était plus." Des propos que Monsieur Gateaud juge "insensés, au sens propre du terme, c'est à dire sans rapports aux actes commis."
Il y a cinq ans, les responsables de la gauche castelroussine n'avaient pas de mots assez forts pour condamner l'attitude et les propos de Ségolène Royal. Mais aujourd'hui, cet épisode est complètement oublié... L'irresponsabilité de Ségolène Royal, son côté "donneuse de leçon" et la légèreté de ses propos... Qui s'en souvient à gauche ? Ou plutôt qui voudrait s'en souvenir parmi les "élites" de la gauche castelroussine ?
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